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Vallées alluviales

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© photo : P. Frutier

Les chiffres clés

  • Avec de 2 à 33 mâles chanteurs selon les années, la Moyenne vallée de l’Oise accueille l’une des dernières populations nationales de Râle des genêts. En France, l’espèce est en déclin. Ses effectifs ont chuté de 90 % ces vingt dernières années, et en 2019, moins de 100 mâles chanteurs ont été recensés (dont une trentaine dans le Maine-et-Loire, une vingtaine dans l’Aube, et… deux dans la Moyenne vallée de l’Oise).

Le dossier complet

Extrait du guide "Nature en Hauts-de-France" :

Dans la région

La diversité des vallées régionales mérite un rapide exposé. D’abord, il y a la vallée sèche, qui entaille les plateaux crayeux de la Somme et de l’Oise. La vallée sèche est d’un autre temps. Elle a été creusée il y a 20 000 ans, en pleine période glaciaire, par des eaux ruisselant sur un sous-sol gelé en permanence. Depuis, le climat s’est réchauffé, la glace a fondu, les eaux se sont infiltrées. Ensuite, il y a la vallée tourbeuse, dont nous pouvons être fiers. En France, nous sommes les seuls à lui accorder une telle place. La vallée tourbeuse est indolente. Le nom celtique de la Somme le montre bien : Samara signifie « rivière calme », « rivière tranquille ». Le cours d’eau ne déborde qu’exceptionnellement, car il est lentement (mais continuellement) alimenté par les sources qui jalonnent son tracé, et qui sont elles-mêmes approvisionnées par la nappe phréatique* du plateau crayeux. Malin. Le sol est gorgé d’eau en permanence, le milieu respire mal, les végétaux se décomposent peu, la tourbe s’accumule. Enfin, il y a la vallée alluviale. Pour beaucoup, il ne s’agit que d’une plaine tant la silhouette d’une vallée est délicate à discerner. C’est mépriser les efforts fournis par les cours d’eau ; il en a parfois fallu, de la patience, pour se creuser un lit douillet. Depuis les hauteurs d’Englancourt, en Thiérache, nous sommes obligés de l’admettre : l’Oise a bel et bien sa vallée. Elle n’est encore que dans son berceau, mais on sent déjà le potentiel alluvial qu’elle exprimera un peu plus loin. À la démonstration du grand canyon du Verdon, les Hauts-de-France répondent à leur façon. Depuis quand la finesse est-elle un manque d’ambition ?

Dans une vallée alluviale, la faiblesse du dénivelé incite à la paresse. La rivière y serpente paisiblement, comme pour mieux profiter de chaque instant ; on est si bien dans son lit mineur*. Toutefois, nous savons ce qu’il faut penser de l’eau qui dort, et de l’automne au printemps, nous pouvons assister à quelques débordements ; le lit mineur ne suffit plus, l’eau retrouve son lit majeur*. Elle en profite alors pour y déposer des alluvions* sous forme de sables, d’argiles et de graviers. Encore faut-il lui laisser cette possibilité. Aujourd’hui, seules quelques rivières, et sur certains tronçons seulement, ont conservé leur liberté d’expression. On pense notamment à l’Aisne, à l’Oise, au trio du Boulonnais (Slack, Liane, Wimereux), aux parties amont du Thérain, de la Canche, de l’Authie et de l’Aa, ainsi qu’aux secteurs aval de la Scarpe et de l’Ailette. Le régime hydrologique de la Marne, de la Lys, de l’Escaut, de la Sambre et de tant d’autres rivières est quant à lui artificialisé par de nombreux aménagements. Canaux et écluses brident leur créativité ; les niveaux d’eau sont régulés, les méandres appartiennent au passé.

Contrairement aux apparences, la vallée alluviale est extravagante. Son cours d’eau est essentiellement alimenté par le ruissellement des eaux pluviales, et quand il décide de s’épancher, il ne fait pas les choses à moitié. Le nom celtique de l’Oise le montre bien : Isara signifie « rivière fougueuse », « rivière impétueuse ». Dans les Alpes, l’Isère n’est-elle pas une rivière torrentielle par excellence ? La vallée alluviale, c’est un cours d’eau et son art de vivre, la formule qu’il choisit quand il veut bavarder. Elle correspond à une mosaïque d’espaces naturels qui partagent tous la même passion pour l’eau. Mais plus qu’une simple compilation de zones humides, elle forme une entité à part entière, dont le fonctionnement est plus complexe qu’il n’y paraît. Lui dédier un chapitre n’a donc rien d’insensé.